mardi 15 janvier 2008

A la fenêtre


La fenêtre, objet particulièrement important au bon fonctionnement du monde. Oui, mais y avez-vous déjà pensé ?

La fenêtre, toute de flexibilité dans ses options Ouverte, Fermée et ses différentes nuances d'Entrouverture, vous permet de réguler avec une précision relevant de la plus haute science l'influx d'air frais (ou pollué, c'est selon) qui parvient jusqu'à vos délicates narines humaines, toujours avides d'un second souffle.

Quand la fenêtre est fermée, on étouffe.

Quand la fenêtre est ouverte, on caille.

Quand la fenêtre est entrouverte, elle ne veut jamais tenir en place.

Oui, je le vois bien dans votre regard, vous aussi connaissez les terribles tourments de la fenêtre. Non content de s'en arrêter là, l'être humain tourmenté a tenté d'apprivoiser cette redoutable compagne quotidienne en l'accablant d'accessoires tous plus maladroits les uns que les autres : les volets, oui, mais surtout les stores ; les stores en bambou, les stores en tissu, les stores qui s'enroulent tout seuls, les stores en plastique. Leur point commun, bien sûr, outre la répétition flagrante de leur nom (lui-même commun, remarquez) est ce dernier : ça ne marche jamais comme vous voulez.

Qui n'a jamais lutté avec un store en bambou dont la ficelle s'obstinait à jouer les fils de l'air ? Qui n'a jamais contemplé avec un désarroi abyssal le store de plastique dont les lamelles insistaient pour fonctionner indépendamment les unes des autres ? Et surtout, surtout, qui n'a jamais eu envie de tout balancer suite à une rencontre trop passionelle avec le store-qui-s'enroule-tout-seul, plus connu sous le nom du store-qui-ne-veut-jamais-se-ré-enrouler.

Loin d'avoir calmé la difficulté des fenêtres, cette invasion de précieux présents n'a fait que la pourrir-gâter, et rendre son utilisation plus complexe : non seulement il vous faut régler l'afflut de la brise, mais en plus voilà qu'on vous demande de la jouer expert des lumières.

Pourquoi, alors, supporte-t-on l'esclavage de la fenêtre ? Parce que comme toute bonne maîtresse, elle sait nous maintenir en haleine, nous donner ces satisfactions illicites et rapides exigées par la vie : sur les bancs du lycée, la fenêtre est un secours quotidien à l'ennui de cours éculés. Au-dessus des ruelles de Pétron-sur-les-Shrapnels, la fenêtre dépasse de loin la télévision au rang du divertissement pour mémés. Et dans l'imaginaire stéréotypé des jeunes adolescents, la fenêtre apparaît comme l'unique voie au sexe sous toit parental.

Bill Gates avait tout compris.